Il faut préserver le paysage par un développement urbain plus compact. Toutefois, cette densification réussie affronte de nouveaux obstacles qu’elle suscite elle-même. C’est le cas de la protection contre le bruit. Un domaine dans lequel les choses commencent à bouger alors que l’isolation acoustique des fenêtres et façades gagne en importance.
Le Conseil des États veut assouplir la construction dans les zones bruyantes. Il s’est prononcé en ce sens le 7 décembre 2023 dans le contexte des modifications nécessaires de la loi sur la protection de l’environnement.
Contexte : selon l’Association des propriétaires fonciers (1), le bruit ambiant comptait parmi les trois facteurs essentiels au choix d’un logement et à la satisfaction qu’il procure. Ce critère arrivait juste après les possibilités d’achat et la desserte par les transports publics. Il s’agit de facteurs généralement plus marqués dans les zones denses. Si l’on souhaite être mobile et pouvoir faire ses achats à tout moment, il faut compter avec un certain bruit ambiant. En revanche, l’excès de bruit rend malade. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) considère le bruit ambiant comme l’un des principaux problèmes de santé parmi tous les risques environnementaux. Le bruit persistant est notamment impliqué dans le développement de maladies cardio-vasculaires, de troubles du sommeil et de lésions auditives permanentes, soit les acouphènes. (3) C’est pourquoi, dans ses lignes directrices, l’organisation se prononce en faveur de certaines limites à des sources de bruit spécifiques. (2) À juste titre, la protection contre le bruit figure désormais en bonne place dans la loi. La législation suisse sur la protection contre le bruit définit des valeurs de planification, des valeurs limites d’immissions et des valeurs d’alarme pour différents types de bruit. Les valeurs d’alarme tiennent lieu de critère explicite pour l’urgence des assainissements et l’installation de fenêtres antibruit. (4)
Une densification forcée peut à son tour augmenter encore le bruit – plus de personnes, des espaces plus étroits, plus de trafic.
Plus grand nombre de personnes, des espaces réduits, une augmentation du trafic : la densification forcée peut elle aussi accroître le bruit. Les distances en relation avec les sources de bruit diminuent, ce qui se traduit en partie par une augmentation des valeurs d’émission. Et c’est bien là que réside le problème : en cas de dépassement de la limite de décibels autorisée, aucun autre bâtiment d’habitation ne peut être construit sur le site. (5)
Dans les grandes lignes, le concept de densification est déjà un succès – la surface des zones à bâtir en Suisse est quasiment restée stable entre 2017 et 2022. Cela, en dépit de l’augmentation de la population. La surface moyenne nécessaire par personne s’était réduite de 309 m2 à 282 m2 en 2022. Aujourd’hui, on construit plus grand ou plus haut. (6) Dans le même temps, de nombreux grands projets sont rejetés par les tribunaux au motif qu’une « autorisation est impossible du point de vue protection contre le bruit » : selon la NZZ, plusieurs projets importants dans des zones bruyantes comprenant des centaines de logements sont gelés en ville de Zurich(7). Cela est le résultat d’un durcissement des pratiques des tribunaux en matière de protection contre le bruit. Comme les autorités, les maîtres d’ouvrage sont confrontés à un dilemme.